Compte-rendu des derniers événements en Syrie

Après le précédent historique de la Syrie quelques articles plus tôt, en voici un plus actuel. La ville de Daraa est moins mentionnée mais les manifestants sont dans les rues depuis le début de la révolte et ne sont pas rentrés depuis. 
Le vendredi 1er avil, venredi des martyrs, les manifestations se sont étendues dans les villages et dans les alentours des villes syriennes. La répression dans les villes de Douma et de Lataké a été très forte ; à Latakié les forces de l'ordre étaient nombreuses, habillées en civil, à aller terroriser les gens en entrant chez eux pour les agresser, en les attaquant à arme blanche dans les rues et en cassant les vitrines des magasins. La ville a été encerclée par l'armée, des snipers appartenant aux forces de sécurité ont été placés sur les toits des bâtiments officiels depuis lesquels on tirait, les arrestations ont été nombreuses, l'électricité a été coupée ainsi que les lignes téléphoniques. Le but de ces manoeuvres était de faire croire à un complot externe auquel participeraient les gangs armés qui ont semé la panique dans les rues ; ce qui n'est pas toujours précisé, c'est qu'en l'absence des forces de l'ordre ces gangs armés ne sont pas visibles.
Le 2 avril, les gens ont enterré leurs morts et le nombre de personnes présentes était encore plus grand que celui des manifestants de la veille.
Chrétiens, sunnites et alewites, Syriens comme Kurdes, ont revendiqué à l'unisson la liberté, la dignité et la démocratie en Syrie. Le gouvernement a ensuite tenté de faire du favoritisme envers certaines ethnies ou religions, et c'est dans l'intention de les séparer qu'il a accordé le 7 avril la nationalité syrienne aux Kurdes ; or cela fait une cinquantaine qu'ils la réclament. Il a accordé aux musulmans sunites la création d'instituts qui enseignent la loi islamique (Al Sharyaa).
Le 8 avril, vendredi de la résistance, les manifestations ont encore pris de l'ampleur, les Kurdes étaient présents avec des panneaux où il était écrit "la nationalité ne fait pas la liberté" et "c'est grace aux martyrs de Daraa qu'on a aujourd'hui la nationalité syrienne". Un alewite a déclaré à Banyas au nom des siens que tout le peuple syrien souffrait de la même manière, de quelque religion ou ethnie qu'il soit, et que les seuls privilégiés étaient les proches de la famille Assad. Ce jour-là, Banyas a été encerclée par l'armée, les forces de sécurité en civil sont descendues dans les rues avec des armes afin de semer la discorde, tout ce qui s'était passé à Latakié s'est ainsi répété à Banyas et à Al Bayda. Ce jour-là, un lieutenant de l'armée a refusé de tirer et s'est fait descendre par les forces de sécurité.
Le 9 avril les morts ont été enterrés, ce qui a provoqué un grand rassemblement en particulier à Banyas et à Daraa.
Le 10 avril, les choses se sont aggravées à Banyas et Latakié, et surtout à Daraa ; les forces de l'ordre ont empêché les ambulances d'avancer pour secourir les blessés, les gens n'osaient plus aller dans les hôpitaux, car les forces de sécurité les kidnappaient. Alors les mosquées et les églises ont ouvert leurs portes pour soigner les blessés. 
Le 11 avril, les étudiants de l'université de Damas, faculté des sciences, se sont réunis pour revendiquer la liberté, la dignité et la démocratie ; une forte répression s'en est suivie qui s'est soldée par quelques morts, quelques blessés et des arrestations. Septante-cinq étudiants ont été ex-matriculés de la faculté. Les rassemblements à l'université se sont étendus à la faculté de médecine, puis plus tard à l'université d'Alep. Un officier et neuf de ses hommes ont été exécutés après avoir refusé de tirer sur la population de Banyas la veille.
Le 12 avril, Washington et l'Europe ont appelé Assad à cesser les violences et à écouter son peuple car la situation dans le pays restait très tendue. A Al Bayda, les femmes et les enfants ont manifesté et coupé l'autoroute en s'y rassemblant afin de revendiquer la libération de leurs pères, maris, frères et fils. 
Le 13 avril, un rassemblement à eu lieu à l'hôpital universitaire de Damas "Al Muassah" qui a été encerclé par les forces de l'ordre, les téléphones mobiles ont été confisqués et écrasés sur les lieux et les forces de sécurité ont à nouveau fait usage de violence.
Le 14 avril Assad a annoncé la formation d'un nouveau gouvernement, un tiers des ministres ont pu garder leur poste et les autres ont été choisis parmi les personnages haut placés du pays. Déception de l'opposition au vu du manque de profondeur de ce changement de gouvernement. Il faut préciser que le ministres des affaires intérieures est l'ancien directeur de la prison de Palmyr, là où les massacres des années huitante ont eu lieu et où un grand nombre de personnes ont disparu.
Le 15 avril est appelé vendredi de l'insistance ; ce jour-là les manifestations ont fait rage partout en Syrie, le nombre des manifestants a décuplé, ils sont sortis partout, dans tous les villages et toutes les villes, y compris dans certains quartiers de Damas, la capitale, comme Rokn Al Deen et Al Mu3addamiya. Ce jour-là officiellement sept personnes sont mortes à Homs, cinq à Talbissa (village près de Homs) et huit à Al Rastan. A Homs beaucoup de personnes ont appelé au secours car la ville commençait à être encerclée et attaquée, tout comme l'avaient été Douma, Banyas, Latakié et Daraa.
Le 16 avril a eu lieu le deuxième discours du président Bashar Al Assad, discours dans lequel il a annoncé la levée de l'état d'urgence pour le 25 avril et une modification de la loi de l'information et de la presse. Il a également annoncé que ces deux réformes devaient stopper les manifestations en Syrie, toutefois ces dernières n'ont fait que prendre de l'ampleur avec l'enterrement des morts ce même jour.
Le 17 avril, fête nationale de la libération de la Syrie du protectorat français, les manifestants ont encore gagné en nombre jusqu'au 18 avril où, à Homs, ville encerclée depuis vendredi, les gens ont fait un sitting sur la place nouvelle de l'Horloge, rebaptisée place de la libération "Al Tahrir". Dès la fin de l'après-midi la place s'est remplie à tel point qu'il n'y avait plus un endroit de libre ; la seule appartenance revendiquée par ces manifestants de toute ethnie et toute religion était celle à la Syrie. Un comité de ces manifestants a eu un entretien avec les forces de l'ordre qui ont promis de ne pas intervenir si le sitting restait pacifique.
Le gouvernement a tenté de faire croire à un soulèvement sous le signe de "Al Jihad" (guerre sainte) et certains imams ont aidé en annonçant l'arrivée imminente de forces de l'ordre vers deux heures du matin le 19 avril. Ils ont ainsi invité les citoyens à mettre fin à ce rassemblement, toutefois environ trois milles personnes sont restées sur place. Les forces de l'ordre ont alors débarqué habillées en civil et ont ouvert le feu, tirant à balles réelles sur les manifestants. Certains imams ont à ce moment-là appelé à "Al Jihad" afin de donner une autre image au rassemblement et justifier les tirs. Le caractère principal du soulèvement syrien est le pacifisme : les manifestants n'ont jamais eu l'intention d'utiliser la violence et n'avaient pas d'armes lorsque les forces de sécurité ont débarqué. Il y a officiellement eu quatre morts ce jour-ci, mais un nombre inconnu de personnes ont tout simplement disparu.
Le 19 avril, toute la ville de Homs était fantomatique : magasins fermés, réseaux mobiles coupés.
Le 20 avril a eu lieu l'enterrement des morts ; des manifestants se sont rassemblés à l'université d'Alep, ils ont été contrés par les forces de sécurités et une trentaine de personnes ont été arrêtées.
Il y a aujourd'hui environ cinq milles détenus d'opinion en Syrie, le président a annoncé son intention de les libérer ; ce même jour, mercredi 20 avril, il a arrêté l'opposant Mahmoud Issa parce qu'il avait donné une interview à Al Jazeera et parlé des morts du sitting de Homs, avant de demander une enquête sur la mort d'un officier homsien.

Lien pour l'article sur l'arrestation de Mahmoud Issa ici

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